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Qualité de vie au travail

Neurodivergence et monde professionnel : une réalité encore trop silencieuse

Christelle ALIMA
Christelle ALIMA |
Dans un monde du travail qui adore les cases, les rythmes réguliers et les comportements bien calibrés, il reste encore très peu d’espace pour les personnes dont le cerveau a sa propre manière de fonctionner.
Et pourtant, être neuroatypique — autiste, TDAH, dyslexique ou autre — n’a jamais signifié être incapable. C’est juste une autre manière de penser, de ressentir, de comprendre.

Ce que beaucoup appellent “différence” est en réalité une richesse. Une finesse de perception, une profondeur émotionnelle, une façon unique de résoudre les problèmes. Mais trop souvent, cette richesse n’est pas reconnue. Elle dérange, elle fait peur, ou simplement… elle n’est pas comprise.

L’intention ici n’est ni de  réclamer un traitement particulier ni de dramatiser une condition. L’objectif est beaucoup plus simple : dire la vérité telle qu’elle est.
La neurodivergence est déjà là, dans les bureaux, les réunions, les mails envoyés tard le soir, les pauses manquées parce que “tout est trop”. Elle avance souvent silencieusement, parfois masquée, toujours en adaptabilité forcée.

Il est temps que les entreprises cessent de regarder ailleurs.
 

🚧 Les défis rencontrés par les personnes neuroatypiques en entreprise

Travailler dans un environnement non pensé pour elles, c’est avancer sur un terrain qui n’a jamais été prévu pour leurs pas. Et pourtant, elles avancent. Toujours.

1. La surcharge sensorielle

Open-spaces bruyants, lumières froides, mouvements constants, sollicitations permanentes…
Pour un cerveau sans filtre, chaque détail devient une information.
C’est un marathon invisible, et chaque jour compte comme une épreuve en plus.

2. Le non-dit social

Les sous-entendus, les jeux d’ego, les attentes implicites, le “tu comprends bien ce que je veux dire”…
Les personnes qui pensent en ligne droite se retrouvent face à des labyrinthes sociaux dont personne ne leur a donné la carte.

3. L’épuisement du camouflage

Beaucoup apprennent à imiter les comportements attendus.
“Fais comme si”, “ne dis pas ça”, “c’est juste une heure de réunion”…
Ce rôle forcé finit par épuiser ce qu’il y a de plus précieux : l’énergie mentale.
Et lorsque le burn-out arrive, il arrive sans bruit — parce que tout a été fait pour sembler “normal”.

4. Le manque d’aménagements concrets

Les ajustements nécessaires sont simples, parfois évidents… et pourtant rarement proposés.
Flexibilité, pauses sensorielles, espaces calmes, télétravail…
Demander ces aménagements est encore perçu comme une demande “en plus”, alors que c’est juste le minimum fonctionnel.


🌱 Ce que les entreprises peuvent — et doivent — mettre en place

Il ne s’agit pas de favoriser une minorité, mais de créer un environnement où chacun peut fonctionner à son plein potentiel — sans devoir s’abîmer au passage.

1. Former les équipes RH et les managers

Comprendre avant de juger.
Sortir des clichés, revoir les réflexes de recrutement, apprendre à reconnaître un besoin réel plutôt qu’un “caprice”.
La connaissance change tout.

2. Repenser le recrutement

Les entretiens classiques ne mesurent que la capacité à performer socialement.
Ils ne permettent pas de voir le talent, la créativité, ou la logique atypique.
Introduire des formats adaptés n’est pas une faveur — c’est du bon sens.

3. Offrir des aménagements sans culpabiliser

Un espace calme, des horaires souples, du télétravail, moins de stimuli, moins de réunions inutiles…
Ce sont des ajustements simples, presque insignifiants en termes de coût, mais colossaux en termes d’impact.

4. Valoriser réellement la différence

La pensée en arborescence, l’hyperfocus, l’esprit d’analyse, la créativité non linéaire…
Ce sont des forces.
Des vraies.
Mais encore faut-il laisser ces compétences s’exprimer sans essayer de les formater.



En conclusion : il est temps d’arrêter de demander aux cerveaux atypiques de s’excuser d’exister


La neurodivergence n’est pas un problème à régler, et encore moins une anomalie à cacher.
Le véritable problème, c’est un système professionnel qui refuse encore de voir ce qui est différent — alors que cette différence est souvent ce qui fait évoluer le monde.

Une entreprise qui apprend réellement à accueillir les cerveaux atypiques n’offre pas un cadeau.
Elle se donne une chance : celle d’aller plus loin que ce que la norme lui impose.

Et la vérité, c’est que les personnes neuroatypiques ne demandent pas grand-chose :
juste le droit d’exister sans se déformer.
D’être comprises sans être excusées.
D’être vues sans être expliquées.

Parce qu’elles sont déjà là.
Et qu’elles ne disparaîtront pas pour que la norme se sente plus à l’aise.

 

 

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